03 Février – Soutenance HDR Sylvain Bordiec

14 h SAlle B016, Bätiment B, Université Paris Nanterre

Soutenance d'HDR Sylvain Bordiec

 

Sylvain Bordiec soutiendra publiquement le vendredi 03 février 2023 à 14h00 ses travaux d'HDR intitulés "Sociabilités, Solitudes, Socialisations. La construction sociale des individus par les territoires, les institutions et l’action publique". Le dossier comprend :

  • Un volume de synthèse (76p.) intitulé Territoires de recherches, recherches de territoires : placements, déplacements et replacements (ou la part territoriale du sociologue).
  •  Un volume original (361p.) intitulé La société des solitudes. Politiques et travail de la solitude dans la France contemporaine.
  •  Une sélection de travaux publiés (ouvrages, chapitres d’ouvrage et articles). 

 
Composition du jury :

  • Marie-Pierre Chopin, Professeure de sciences de l’éducation, CEDS, Université de Bordeaux.
  • Vincent Caradec, Professeur de sociologie, CERIES, Université de Lille.
  • Vincent Dubois, Professeur de science politique, SAGE, Sciences Po Strasbourg.
  • Cédric Lomba, Directeur de recherche, CNRS/CRESPPA-CSU.
  • Maud Simonet, Directrice de recherche, CNRS/IDHES (garante).

Résumé du volume original : "La société des solitudes. Politiques et travail de la solitude dans la France contemporaine" 

Ce mémoire étudie les solitudes des vivants. Faisant référence à La solitude des mourants (Elias, 1982) de Norbert Elias, ce libellé permet de rendre justice au travail du sociologue sur cette notion à laquelle il ne donne ni définition unique ni définition définitive. Les solitudes sont irréductibles aux retraits du social que peuvent expérimenter les individus, pour le meilleur – la restauration de soi et le bonheur – ou pour le pire – la destruction de soi et le malheur. Les solitudes sont aussi les « coupures » sociales que diagnostiquent et prennent en charge les institutions publiques, parapubliques et privées, tributaires, dans leur activité sociale, des luttes entre territoires (Harvey, 2008) et au sein des territoires.
Une première partie intitulée Impulsions, formalisations, manifestations : politique(s) de la solitude considère les ressorts de classe, de genre et de territoire de ces « luttes » contre les « solitudes à problèmes » impulsées par les classes supérieures – souvent leurs fractions masculines –, mises en œuvre par les classes moyennes – majoritairement leurs fractions féminines, encouragées, depuis les « sommets de l’Etat » (Simonet, 2018), à travailler bénévolement – et principalement destinées aux pauvres, aux personnes âgées et aux handicapés. Intégrer l’Etat (Bourdieu, 2012) dans l’analyse permet d’éviter de constituer la solitude et ses luttes en phénomènes asociaux et apolitiques : dans une société supposée « libre » et « démocratique », la solitude incombe, avant tout, à la responsabilité de l’individu. En conséquence, le fait qu’il revient à quelque institution extra-familiale et extra-amicale de la prendre en charge ou de la rompre n’a rien d’évident.
L’ensemble des opérations d’enquête de terrain effectuées, principalement dans un territoire rural du Sud-Ouest de la France, permet d’éclairer, dans une deuxième partie intitulée Travail de la solitude : bénévoles, publics et « partenaires » dans la lutte, les liens entre solitudes et luttes contre les solitudes. Il s’agit de mettre au jour, à travers l’étude du « travail en situation » (Fournier, Hatzfeld, Lomba, Muller, 2008) et la réinscription des bénévoles et des publics dans la « matrice sociale du travail » (Simonet, 2010), l’envers de la participation sociale mais aussi les participations que favorisent les absences de participation. La recherche contribue ainsi à la compréhension de la fabrique sociale des
individus (Lahire, 2013), à la documentation des ressources nécessaires pour être ajusté aux normes dominantes d’être un être social et, partant, des caractéristiques de celles et ceux qui ne disposent pas de ces ressources.
Comme le souligne une troisième et dernière partie intitulée Incidences de la solitude, les politiques et le travail de la solitude se nourrissent, de façon inextricable, des détresses qu’engendre l’ordre social et ce que ses tenants sont en mesure de faire (faire) pour signifier leur réaction : leur réponse collective à la désolation est la consolation. Cette consolation est payante sur le plan moral. Elle est aussi avantageuse sur le plan matériel et financier puisque prise en charge gratuitement, au sein d’associations, par des travailleuses bénévoles. Par certains aspects, attendu qu’il met potentiellement tout le monde au travail pour enrayer les mises à l’écart du social, le « problème de la solitude » est un « problème social gratuit ».
Les refoulé.e.s du social ne sont pas exclusivement les sans amour, les sans famille, les sans amis, les sans collègues, bref les sans personne, mais aussi celles et ceux qui ne savent pas être seul.e.s. C’est pourquoi, le problème des diagnostics de solitude n’est pas la solitude, qui est la norme : au contraire, le problème est de ne pas pouvoir s’y conformer, de ne pas savoir être un homo clausus équipé pour la solitude. Tant qu’il y aura des personnes pour les sans personne, celles-ci se maintiendront à flot social. Ceci étant, les politiques et le travail de la solitude ne sont pas seulement une dimension de l’État contemporain : elles sont aussi, comme le sont le « contrôle des assistés » (Dubois, 2021) et « l’engagement citoyen » (Simonet, 2010), un rouage de l’ordre social et sexué.

Public : évènement ouvert au public
Lieu : Salle B016, Bâtiment B, Université Paris-Nanterre

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